Communiqué - Les raffineurs de pétrole européens privilégient l'option non-durable des biocarburants à celle de l'hydrogène vert
Les groupes pétroliers présentent souvent l’hydrogène comme “le” carburant d’avenir dans les transports, sur lequel ils parieraient gros. Mais une nouvelle étude réalisée pour le compte de Transport & Environment (T&E) [1] montre que les investissements dans le raffinage des biocarburants sont huit fois plus importants que ceux dans l’hydrogène. T&E accuse les compagnies pétrolières de ne pas vouloir investir sérieusement dans des carburants véritablement propres, mais de choisir l’option facile et non durable des biocarburants.
De plus, lorsque les compagnies pétrolières investissent dans l’hydrogène, seule une partie de ces investissements est “verte”. La grande majorité des montants sont en fait destinés à réduire l’intensité carbone des opérations de raffinage, et non à développer des carburants verts pour les transports, explique l’étude.
“Les producteurs de pétrole présentent l’hydrogène comme leur grand pari pour l’avenir, mais en réalité leurs investissements dans l’hydrogène vert sont dérisoires. A la place, ils concentrent leurs nouvelles capacités de raffinage sur les biocarburants qui ne peuvent pas répondre durablement aux besoins en matière de transport. En réalité, l’industrie pétrolière n’explore toujours pas le potentiel des technologies propres” explique Diane Strauss, directrice de T&E France.
Selon l’étude, la consommation de pétrole du transport routier dans l’UE diminuera de près d’un tiers d’ici 2035, car un nombre croissant de voitures passeront à l’électrique. Après 2035, la demande d’essence continuera à baisser de 5 % par an. Une grande partie des capacités de raffinage actuelles devront donc fermer ou, pour éviter de devenir des actifs échoués (stranded assets), devront être converties pour fabriquer des carburants alternatifs.
Sur les 39 milliards d’euros d’investissements prévus dans le secteur du raffinage pour les carburants alternatifs d’ici à 2030, près de 75 % seront consacrés à l’augmentation de la production de biocarburants. Selon l’analyse de T&E, cette capacité est quatre fois supérieure à celle qui peut être obtenue de manière durable dans l’UE. Cela conduira probablement à une utilisation limitée de “déchets” tels que les graisses animales provenant d’autres industries, ainsi qu’à des importations massives d’huiles de cuisson usagées à la provenance douteuse.
En France, Total va ainsi convertir la raffinerie de Grandpuits (Seine-et-Marne). Sa réouverture est prévue pour 2024 et sa production devrait atteindre 400.000 tonnes de biocarburants (dont 120 000 tonnes de biodiesel) par an.
Parmi ces 39 milliards d’euros, deux à trois milliards seront exclusivement investis dans de nouvelles usines de biocarburants avancés (HVO, huile végétale hydrotraitée) soit un doublement de r la capacité de production pour atteindre 10 millions de tonnes d’ici à 2030.
Enfin, le raffinage du pétrole est toujours l’un des principaux utilisateurs d’hydrogène. La plupart des raffineries utilisent de l’hydrogène “gris” à forte intensité carbone, car fabriqué à partir de combustibles fossiles. Selon l’étude, les compagnies pétrolières investissent environ 6,5 milliards d’euros dans l’hydrogène “bleu”, dit “à faible teneur en carbone”, pour assainir leurs processus de production. C’est le double de ce qu’elles dépensent pour produire de l’hydrogène vert et des e-fuels, qui pourraient être utilisés pour assainir l’aviation et le transport maritime [2].
“Lorsque les producteurs de pétrole investissent dans l’hydrogène, la plupart de ces investissements servent à remplacer l’hydrogène gris par de l’hydrogène bleu, qui utilise toujours du gaz fossile polluant. Au lieu de perdre leur temps avec des solutions faciles de court terme, les raffineurs de pétrole devraient passer dès maintenant à la production d’hydrogène vert et de e-fuels pour les navires et les avions” conclut Diane Strauss.
Notes aux éditeurs
[1] L’étude a été menée par Ricardo Energy & Environment, un cabinet international de conseil spécialisé dans l’environnement et l’ingénierie.
[2] L’hydrotraitement et l’hydrocraquage, procédés utilisés pour réduire la teneur en soufre des produits pétroliers finis, consomment de grandes quantités d’hydrogène. Selon le rapport 2019 de l’AIE intitulé “Le futur de l’hydrogène“, 33 % de tout l’hydrogène produit aujourd’hui est utilisé dans les raffineries (38 Mt H2/an).
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