Les terres actuellement exploitées pour produire les biocarburants seraient mieux employées autrement, soit pour nourrir les populations, soit pour séquestrer du carbone. C'est ce que révèle l'étude menée par Transport & Environment (T&E) et publiée ce jeudi.
L’Europe gaspille actuellement 9,6 millions d’hectares, une superficie équivalente à celle de l’Irlande, pour la production de biocarburants, ce qui constitue un obstacle à la lutte contre le changement climatique. L’étude commandée par T&E et publiée ce jeudi montre que, si elles retournaient à l’état naturel, ces terres absorberaient deux fois plus de CO2 que ne le permet l’utilisation des biocarburants en remplacement des énergies fossiles. La surface utilisée pourrait également permettre de nourrir 120 millions de personnes, ce qui renforcerait considérablement la sécurité alimentaire.
Diane Strauss, directrice de T&E France, explique: « Nous accaparons de vastes étendues de terre pour des cultures que nous brûlons dans nos voitures. C’est un gaspillage scandaleux. Ces terres pourraient nourrir des millions de personnes ou, si elles étaient rendues à la nature, constituer des puits de carbone riches en biodiversité. Les biocarburants issus de cultures sont probablement la chose la plus stupide jamais promue au nom du climat ».
Les biocarburants consommés en Europe nécessitent 9,6 millions d’hectares de terres – une superficie plus grande que l’île d’Irlande (République d’Irlande et Irlande du Nord) [1]. Si les terres utilisées pour les biocarburants retrouvaient leur état naturel, elles pourraient absorber environ 65 millions de tonnes de CO2 de l’atmosphère. C’est près du double des économies nettes de CO2 officiellement permises par les biocarburants lorsqu’ils remplacent les combustibles fossiles.
En parallèle, il serait possible de consacrer une petite partie des terres à des fermes solaires. Une solution efficace d’un point de vue énergétique. Selon l’analyse de T&E, il faut 40 fois plus de surface pour alimenter une voiture utilisant des biocarburants qu’une voiture électrique alimentée par l’énergie solaire. Pour produire la même quantité d’énergie, l’énergie solaire ne nécessiterait que 2,5 % des terres actuellement consacrées aux biocarburants, le reste étant disponible pour rester à l’état naturel ou pour la culture de denrées alimentaires.
En effet, les récoltes cultivées sur les terres dédiées aux biocarburants pourraient servir à couvrir les besoins caloriques d’au moins 120 millions de personnes [2]. Ce serait plus que suffisant pour nourrir les 50 millions de personnes qui, selon les Nations unies, sont « en situation d’urgence ou d’insécurité alimentaire aiguë.»
« Les biocarburants sont une expérience ratée. Continuer à brûler des aliments comme carburant alors que le monde est confronté à une crise alimentaire mondiale, c’est presque criminel. Des pays comme l’Allemagne et la Belgique discutent déjà de la limitation des biocarburants issus de cultures vivrières en réponse à cette situation. Le reste de l’Europe doit faire de même », conclut Maik Marahrens, responsable du secteur biocarburants à T&E.
L’UE s’est fixée des objectifs pour stopper et inverser la perte de biodiversité dans sa « loi sur la restauration de la nature ». Les matières premières des biocarburants occupant une grande partie des terres cultivées en Europe, la fin de l’utilisation des terres pour les biocarburants serait une étape importante pour atteindre cet objectif.
Notes aux éditeurs
[1] Ce chiffre fait référence à la superficie totale nécessaire pour cultiver les plantes utilisées pour la consommation de biocarburants en Europe, en incluant les importations. Une partie de ces cultures est transformée en « coproduits », principalement en aliments pour animaux.
Les chiffres suivants, relatifs à l’alimentation et au piégeage du carbone dans ce communiqué de presse, font référence à la superficie allouée aux biocarburants uniquement (5,3 millions d’hectares), sans tenir compte de la superficie allouée aux coproduits (4,3 millions d’hectares). La répartition de ces surfaces a été calculée selon la méthode de l’allocation énergétique. La méthodologie appliquée suit les règles définies dans la deuxième version de la directive européenne sur les énergies renouvelables (RED II).
[2] En prenant l’hypothèse que les terres aujourd’hui entièrement consacrées aux biocarburants destinés à la consommation en Europe (5,3 millions d’hectares) seraient utilisées pour la culture du blé.
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