Des analyses montrent qu'un embargo sur le pétrole est possible, mais que l'Europe ne doit pas échanger un despote contre un autre.
L’Europe donne à Poutine $285 millions par jour pour couvrir ses besoins de pétrole, selon de nouvelles données[1]. Transport & Environment (T&E), qui a réalisé l’étude, appelle à rejoindre un embargo mondial sur le pétrole russe pour arrêter de financer la guerre de Poutine. L’analyse estime que la Russie a reçu $104 milliards de dollars de ses exportations de pétrole pour l’Europe et le Royaume-Uni l’an dernier, ce qui éclipse ses recettes gazières ($43.4 milliards).
William Todts, Directeur chez T&E, a déclaré : “L’Europe envoie chaque jour un quart de milliard d’euros à Poutine, alors même qu’il mène une guerre à ses frontières. Un embargo sur le pétrole paralyserait son régime et rendrait extrêmement difficile la poursuite de sa guerre. Il est temps d’améliorer considérablement l’efficacité des transports et d’accélérer l’électrification des véhicules afin de réduire notre consommation de pétrole.”
L’Europe dépend du pétrole russe pour près d’un quart de son pétrole brut. Si certains pays européens comme la Slovaquie dépendent de la Russie pour plus de 90% de leur pétrole, la dépendance du continent dans son ensemble, bien qu’importante, n’est pas insurmontable, montre l’analyse.
Contrairement au gaz, la plupart des importations de pétrole dans l’Union européenne se font par des pétroliers et des ports. Entre 4 et 8 % seulement des approvisionnements en pétrole de l’Europe passent par des oléoducs russes – jusqu’à 30 % du total des exportations russes de pétrole vers l’Europe – ce qui signifie qu’il est possible de s’approvisionner ailleurs à court terme.
Toutefois, cela ne résout pas la dépendance long terme de l’Europe au pétrole, prévient T&E. La nouvelle stratégie de l’UE en matière d’énergie et de sécurité (“Energy and Security Strategy”), qui sera lancée mercredi, vise à protéger l’Europe contre le risque de rupture d’approvisionnement énergétique et la hausse des prix, en particulier pour les pays européens qui dépendent fortement du gaz russe. À l’heure où le gouvernement des États-Unis considère un embargo pétrolier, le fait que l’UE ne mentionne même pas le pétrole dans sa stratégie d’énergie, remet en question la détermination de l’UE à mettre fin à l’invasion de l’Ukraine.
Les prix mondiaux du pétrole ont doublé depuis avril 2021, atteignant 120 dollars le baril (pour le Brent), ce qui met la pression sur les ménages européens. T&E recommande que la stratégie d’énergie et de sécurité comprenne des mesures visant à se préparer aux perturbations du marché pétrolier, notamment l’augmentation du travail à domicile et des journées sans voiture, ainsi que la réorientation des fonds du plan de relance pour soutenir la mise sur le marché de masse des véhicules électriques.
William Todts conclut : “L’UE doit réécrire sa stratégie d’énergie et de sécurité pour y inclure le pétrole. Le gaz est une préoccupation compréhensible, mais c’est le pétrole qui finance la guerre de Poutine. En dépendant de ce dernier, les Européens sont dangereusement exposés à la hausse des prix dans un monde de plus en plus incertain. Toute stratégie de sécurité énergétique qui ignore le pétrole ne vaut absolument rien.”
Note aux éditeurs
[1] Les prix pour 2021 sont estimés sur la base du prix moyen de la Banque mondiale pour l’année dernière et des volumes d’importation de pétrole pour 2019 (Eurostat) avant la pandémie, qui a entraîné une baisse ponctuelle de la demande.
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