Comment réduire les émissions CO2 des flottes commerciales par la fiscalité.
Le parc des véhicules de société est à la fois l’un des principaux facteurs d’émissions en France et une voie prometteuse pour un transport zéro-émission. Souvent négligées en tant que source d’émissions routières, les flottes de véhicules de société représentent la moitié (52 %) des nouvelles immatriculations de voitures particulières chaque année. Etant donné qu’elles parcourent près de deux fois plus de kilomètres par an que les voitures particulières, elles sont responsables de deux tiers (67%) des émissions de CO2 des véhicules nouvellement immatriculés, soit 2 % des émissions totales de gaz à effet de serre en France. Une solution pour réduire ces émissions est à portée de main —l’électrification— et la réforme fiscale peut orienter le parc automobile des entreprises vers ce changement.
Dans le but de réduire les émissions des flottes commerciales, la loi Climat et Résilience exige des gestionnaires de flottes qu’ils intègrent progressivement des véhicules à faibles émissions dans le renouvellement annuel de leur flotte. En 2022, 10% des nouvelles immatriculations devront être des véhicules à faibles émissions (moins de 50g de CO2/km), pour atteindre 70% en 2030.
Pourtant, en l’absence de sanctions prévues par la loi, le scénario d’un échec généralisé de cette transition est envisageable. L’électrification du parc automobile français se heurte, en effet, à d’importants freins.
Tout d’abord, les politiques fiscales et industrielles actuelles n’encouragent guère les véhicules électriques à batterie (VEB) dans les segments de véhicules les plus petits ou dans le secteur de la location.
Parallèlement, les ventes de véhicules électriques hybrides rechargeables (VHR) polluants connaissent un essor considérable dans les flottes commerciales. Le marché des véhicules de société représente les trois quarts (73%) de tous les VHR. Les VHR sont éligibles aux taux de renouvellement en tant que voitures à faibles émissions malgré les études démontrant que ces véhicules émettent entre deux à quatre fois les quantités de CO2 affichées publiquement. En considérant les VHR comme des voitures à faibles émissions, la loi française crée un effet d’aubaine pour ce marché et met en péril les bénéfices climatiques de cette loi.
Ce rapport explore comment le système fiscal français peut être utilisé pour surmonter ces défis et positionner la France comme un leader dans la transition vers un système de transport à zéro émission. Notre analyse révèle que de nombreux mécanismes fiscaux soutiennent encore les voitures de société polluantes, en contradiction avec les objectifs politiques et climatiques français. Ce rapport présente des propositions ciblées visant à accroître l’attractivité des voitures électriques, autant pour les sociétés de location à long terme, les gestionnaires de flotte que les employés – cela avec un effet positif sur les dépenses publiques et une réduction significative des émissions de gaz à effet de serre.
Ces recommandations s’appliquent aux voitures particulières. Il sera nécessaire d’explorer la possibilité d’appliquer une approche similaire aux véhicules utilitaires légers, tout en trouvant le moyen d’exempter les petites et très petites entreprises qui représentent 50% des véhicules utilitaires légers en France.
Le changement de fiscalité proposé permettrait l’arrivée d’un million de VEB supplémentaires dans les flottes d’ici à 2030, soit deux fois plus que les prévisions actuelles. Les VEB constitueraient alors 97% des ventes de véhicules de société. Les mesures proposées permettraient ainsi la réduction de 11,2 millions de tonnes de CO2 d’ici à 2030 sur les flottes réelles et 43 millions de tonnes de CO2 sur l’ensemble de leur durée de vie.
Le potentiel de transition de la France vers une flotte d’entreprise à zéro émission est important. Le parc de véhicules de société a une influence considérable sur le marché des voitures particulières. Très réactif aux changements fiscaux, ce marché constitue une opportunité à saisir dans la transition vers un transport à zéro émission.
Sans réforme, les flottes de société pourraient manquer leur transition entre 2021 et 2025. On observe d’ailleurs que d’autres pays européens comme l’Allemagne semblent avancer plus vite sur l’électrification de leurs flottes en 2021. Or, la faible progression des ventes de VEB représente évidemment un enjeu important pour la trajectoire climatique de la France, mais cette tendance constitue aussi un risque important pour la compétitivité des constructeurs automobile français et leur conformité aux normes européennes.
La loi de finances régit toutes les taxes clés qui influencent les décisions du parc automobile d’entreprise et représente donc une opportunité importante. L’instauration de réformes fiscales, comme celles recommandées dans ce rapport, ferait rapidement évoluer les gestionnaires de flottes vers une offre électrifiée et positionnerait ainsi la France comme un leader dans la transition vers un système de transport à zéro émission.
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